Je perçois désormais la vanité
de nos existences et la mienne particulièrement. Notre lot commun,
la mort ! Cette mort que j’ai si souvent ordonnée en espérant
la fuir définitivement. Que nous nous complaisions dans la luxure ou
que nous menions une vie ascétique, pour tous la même finalité,
le trépas et puis l’oubli. Prophète d’une eschatologie morbide,
d’une téléologie dégoulinante de sang. De cette perspective je
n’envisage plus qu’une option : le bien. Faire le bien à la
hauteur de ses moyens, se comporter dignement, voilà toute vérité.
Il y a peu de temps, j’ai
rencontré une femme sur la plage. Elle-aussi était une âme en
errance avant d’atterrir sur ce plan paradisiaque, au milieu de ces
êtres de lumière. Tout comme moi elle tente de se construire une
ontologie céleste, pour devenir fils et fille de chérubin. Sa peau
est mate et pourtant diaphane, sa chevelure noire de jais mais aux
reflets or, toute son entité est un sublime paradoxe. C’est un
spécialiste de l’angéologie qu’il me faudrait pour vous la
décrire entièrement.
Je réapprends à aimer à son
contact. A aimer sa présence, débarrassé de ma libido déviante et
de mes instincts sadiques. Séraiä a vendu son corps pendant des
années pour survivre et elle en garde quelques stigmates. Elle
m’enseigne la tendresse, le frisson et la légèreté des corps.
J’ai rasé ma barbe et mes
cheveux longs, vestige d’une époque morte à jamais. Ces petits
détails contribuent à ma renaissance. Mes tatouages et mes
scarifications, quant à eux, resteront malheureusement.
Nous déambulons au bord de la mer
d’émeraude, croisant séraphins, trônes et toute une panoplie
d’autres anges, créatures divines, soldats des dieux bons et
loyaux. Leurs visages sont à la fois durs et innocents, se dégageant
d’eux la pureté du combat juste. Ils sont mes modèles, mes
sauveurs, ma dernière citadelle. C’est parmi eux que j’ai trouvé
mon maître, celui qui m’a tendu la main : Onasis-Baptistin.
Samuel d’Halescourt