lundi 30 novembre 2015

2084 La fin du monde – Boualem Sansal (2015) Note : 14/20

2084 La fin du monde – Boualem Sansal (2015)

Allégorie en forme de sonnette d’alarme


Les deux premiers tiers du bouquin sont excellents, présentation du monde et son appréhension par le personnage principal, mais malheureusement le dernier tiers, les cents dernières pages paraissent inutiles tant l’essentiel a été dit dans le reste du roman.

Si ce n’était une projection, une prospective voire une allégorie, on parlerait, dans un langage purement S-F, de planet opéra, tous les éléments y étant réunis.

L’action se déroule dans un univers que je qualifierais de techno-médiéval que l’on pourrait aisément comparer avec celui de la légende d’Hawkmoon de Moorcock, obscurantiste et rétrograde.

La langue est belle, paradoxalement peut-être un peu trop belle pour de l’anticipation. Etre trop lettré ou trop savant sémantiquement est-il un handicap pour ce genre de littérature ? Le plaisir des mots peut-il prendre le pas sur l’immersion souhaitée ?

Boualemn Sansal crée un néologisme judicieux pour ériger et étoffer son futur dystopique, le burnikab, mélange de burka et de nikab, éclairant d’évidence l’objet de sa critique acerbe.

Dans 1984, Orwell s’est inspiré des deux grands totalitarismes du XXème siècle. Dans 2084, Sansal pousse le dernier en date jusqu’à sa logique ultime. Il en change le dieu et le prophète afin d’appuyer plus pertinemment encore sa démonstration.

Pour conclure, un livre malheureusement pas au niveau du sujet fondamental dont il s’empare. La description des rouages du monde et les citations du Gkabul sont intéressantes mais le récit en lui-même, pourtant prometteur, s’empêtre dans le rien, dans un manque d’imagination qui fait cruellement défaut.

Tous les noms des personnages de Sansal ne comportent que trois lettres : Ati, Koa, Nas, Abi etc. et cela a forcément un sens. Certainement une façon de renforcer le caractère tyrannique du futur qu’il dépeint, où même les noms sont strictement encadrés par une norme délirante considérée comme divine.





Samuel d’Halescourt

dimanche 29 novembre 2015

Top 10 des meilleurs sagas, séries ou cycles de bandes-dessinées (la franco-belge, la nôtre)

Top 10 des meilleurs sagas, séries ou cycles de bandes-dessinées (la franco-belge, la nôtre)




Comme d’habitude, je glisse ma lapalissade et précise qu’il s’agit de celles que j’ai lues, ne pouvant classer celles dont j’ignore le contenu.




  1. - HK (Morvan-Herault)
(le 1er cycle et le 2ème avorté)


  1. - Les chroniques de la lune noire (Froideval-Ledroit-Pontet-Angleraud)
(et ses arcanes)


  1. - Lanfeust de Troy (Arleston-Tarquin)


  1. - Krän (Eric Hérenguel)


  1. - Les Technopères (Jodorowsky-Janjetov-Beltran)


  1. - Ranx (Liberatore-Tamburini)

  1. - Lanfeust des étoiles (Arleston-Tarquin)


  1. - Sha (Mills-Ledroit)


  1. - Thorgal (Rosinski-Van Hamme)

  1. - Golden city (Pecqueur-Malfin)






Samuel d’Halescourt

mercredi 25 novembre 2015

Huitième message du Kindred : Le songe d’une nymphe en bas résille

Huitième message du Kindred


Le songe d’une nymphe en bas résille




Dridge et moi avons continué à discuter pendant près d’une demi-heure. Evoquant nos combattants préférés du MHB, avant tout les poids méga lourds, les plus de deux cents kilos, la catégorie reine où orques, cyclopes, minautores et semi-géants tiennent le haut du pavé.

Puis nous avons évoqué les magouilles du gouvernement, deux sujets dénués de tout rapport si ce n’est celui de passionner les foules. Dridge et ses fines dreadlocks était intarissables sur le second. Sa hargne et sa colère légèrement feinte étaient particulièrement roboratives. Le président de la fédération, Jacob Cissé, était rhabillé pour l’hiver.


Sur le chemin du retour, je fais un détour par le quartier chaud dans l’unique but de me rincer les mirettes. Enfin quartier, deux rues perpendiculaires qui, vues du ciel, formeraient la croix du Christ. Ça n’a rien de glauque, l’endroit est très éclairé et plutôt salubre. La faune qui s’y concentre échappe à toute notion de dangerosité ou de climat patibulaire. Un décorum sain et aseptisé.

Je suis interrompu dans ma déambulation platonique par une rabatteuse qui m’alpague véhémentement. Elle me sort un baratin automatique, des tu verras, tu seras pas déçu, c’est la chance de ta vie, une possibilité de titiller le nirvana, l’occasion d’épaissir ta virilité.

Sa logorrhée est tellement bien rodée que je me laisse séduire. Je monte avec une des filles de l’établissement. Une petite blonde à la coupe asymétrique, long d’un côté, rasé de l’autre, à laquelle il manque deux doigts à la main droite.

Les promesses de la mama-san n’ont pas été tenues. Je n’ai rien vu du tout, j’ai joui assez rapidement dans le soubassement de la frêle Pémala en lâchant un léger râlement inaudible. Malgré l’apaisement de l’éjaculation, je restai sur un goût d’inachevé, l’humeur faussement perturbée. Stabilisé depuis quelques années, je n’ai à peine senti les embryons de culpabilité et de désespoir poindre.

J’ai allongé le fric et je suis reparti comme j’étais venu, le fardeau en moins !

Je vous recontacte prochainement.








Samuel d’Halescourt

dimanche 22 novembre 2015

Les Pantins cosmiques – Philip K. Dick (1957) Note : 14/20

Les Pantins cosmiques – Philip K. Dick (1957)


Roman de troisième catégorie




Livre particulier de la part du Dick, le chaînon manquant entre l’œuvre de HP Lovecraft et celle de Stephen King.

Ted Barton revient dans sa petite bourgade natale où personne ne se souvient de lui et où tout a changé. Il apprend que tout ceci est dû à un combat ancestral que se livrent deux divinités cosmiques, Ahriman, le mauvais et Ormadz, le bon.

A l’aide d’un vieil homme qui n’a pas oublié le monde d’avant et grâce à une de ses inventions, il va s’employer à redonner naissance au bon ordre des choses.

Le conflit entre les deux entités, les deux grands anciens pseudo-lovecraftiens, est ce qui semble le plus intéressant dans ce court roman. Leur évocation a quelque chose de vertigineux, grandissime et fascinant.

La compagne du héros, figure féminine du roman, est pour le moins très Dickienne. Elle évince Ted parce que leur plan, leur désir divergent et lui lance un ultimatum qu’il ne pourra satisfaire, trop absorbé par son obsession de comprendre ce qui est arrivé à sa ville.

On est plongé dans l’atmosphère des petites villes américaines, au décor mimétique, entourées de nature, propices au déferlement d’évènements paranormaux. Notre subconscient en est tellement abreuvé qu’il est comme chez lui.

Après ses livres de science-fiction, majoritaire, ses romans classiques de « vraie littérature », voici une nouvelle catégorie avec un représentant unique.

Pour conclure, un bouquin mineur, peut-être le plus mauvais de la petite trentaine que j’ai dans les pattes du visionnaire Philip K. Dick. Ma passion pour cet auteur n’est plus à prouver, mais l’objectivité nous pousse à admettre que « Les Pantins cosmiques » occupe la queue du peloton. Donc décevant mais reste néanmoins une certaine tenue, un peu de génie qui s’infiltre, de façon éparse, ici et là, des fulgurances disséminées qui rattrapent la globalité.










Samuel d’Halescourt




mardi 17 novembre 2015

Une bougie sur le gâteau du Kindred




Merci à tous ceux qui suivent assidûment le flot des publications et à ceux qui sont venus jeter un petit coup d’œil au détour d’un clic.

Le Kindred et ses vicissitudes fêtent leur premier anniversaire et titubent dangereusement.

La seconde saison sera encore plus riche, performante et trépidante.

Salutations cosmiques.











Samuel d’Halescourt

dimanche 15 novembre 2015

Deuxième antienne du Kindred : Les trompettes mythologiques

Deuxième antienne du Kindred
Les trompettes mythologiques


Créatures nées du génie humain, d’une génétique aux possibilités illimitées, dans le folklore des siècles passés, oublié puis ressuscité.

Monstres ou minorités mythologiques suivant son bord, son œilleton. Des centaines de races, compatibles à la reproduction avec l’homme, aboutissant à des demis et à des mulâtres. Certains sont au monde à plusieurs millions, d’autres à seulement quelques milliers. Les nains et leur royaume en Norvège, les elfes blancs autour de la mer Caspienne, les elfes noirs s’emparant d’un tiers du Gabon, les orques considérant la France comme la terre promise, les gobelins et leurs deux foyers : Japon et Canada. Et le reste, trop peu nombreux pour se constituer en nation, éparpillé aux quatre coins des plus gigantesques mégalopoles.

Scientifiques acharnés répondant à la maxime qui veut que tout ce qu’il sera possible de faire, l’humanité le fera. Les enfants de Tolkien, des jeux de rôles et du populaire, ils avancent à vue, se construisant au débotté leurs idiosyncrasiques paradigmes.

Le cinéma s’en frotte les mains, les films de fantasy écartent déguisement et synthèse pour de la chair mobile et concrète.

Méta-humanoïdes, sources de fantasmagories et de surréalismes dans une réalité jusque là empreinte de tristesse, d’une espèce qui se regardait le nombril.

Les partis et mouvements hostiles sont advenus défenseurs de la pureté du génome, du Sapiens tout puissant comme à l’origine ; rien d’inquiétant, juste l’expression d’atavique protection, le repoussement des menaces pour l’entité première.
Et pourtant, l’humanité et ses simulacres folkloriques doivent se tendre la main et percer ensemble les secrets d’un univers par trop abscons.




Samuel d’Halescourt

samedi 14 novembre 2015

Mortel transfert de Jean-Jacques Beineix (2001) Note : 15/20

Mortel transfert de Jean-Jacques Beineix (2001)

« Et le Jack Russel en plus ! »


Beineix livre un ultime film, du moins considéré comme tel en ce mois de novembre 2015. Peut-être s’est-il lui-même mis en retrait et éloigné du cinéma ou est-ce les producteurs, profession composée très largement d’opportunistes cupides, qui n’ont pas le courage et l’amour de cet art suffisant pour le produire ?

Si la deuxième hypothèse est vraie, ils prouveraient par-là qu’ils n’aiment pas le cinéma français et leurs démiurgiques sentinelles, méritant ainsi notre mépris, notre crachat !

Tout est déjà contenu dans la scène d’ouverture. Jean-Hugues Anglade, psychanalyste que l’on devine psychiatre de formation par le fait qu’il délivre, à un moment donné, une ordonnance et qu’il évoque ses études de médecine, suit lui-même une analyse chez un confrère, Robert Hirsh. Dans le cabinet se trouve un tableau vénitien où des hommes déguisés et masqués regardent la rue. C’est l’annonce des aventures qui attendent Anglade, les faux-semblants, la quête initiatique, la perdition et puis la renaissance.

Beineix fait son Kubrick et inscrit son Mortel transfert comme le Eyes Wide Shut français.

C’est une étude sur la paranoïa qui peut s’installer chez l’individu lorsque l’on n’a pas l’esprit tranquille, que la culpabilité, réelle ou artificielle, pèse comme une masse et pousse au délire.

Pour conclure, un film merveilleux, sombre mais non dénué d’humour où le fétichisme se confond avec l’avarice. L’ambiance y est parfois lourde et malsaine, semblable au téléfilm érotique du dimanche soir d’M6 que nous regardions jeunot.

Il faut préciser qu’Yves Rénier est excellent dans les quelques scènes que lui octroie son personnage dans un minuscule second rôle. Il y est intense et intimidant.

Une cavalcade dans un Paris obscur où tout paraît étrange, entre rêve et cauchemar.




Samuel d’Halescourt

mardi 10 novembre 2015

La seule exactitude – Alain Finkielkraut (2015) Note : 16/20

La seule exactitude – Alain Finkielkraut (2015)


Un flingue avec un nœud papillon




Autant annoncer la couleur, ce livre m’a régalé. Une accumulation de courts chapitres qui traitent de l’actualité de ces deux dernières années où Finky délivre ses sublimes exaspérations, son divin accablement.


Il me semble que dans les années soixante et soixante-dix, les philosophes les plus intéressants étaient principalement de gauche. Aujourd’hui, les intellectuels les plus passionnant sont quasiment tous classés à droite. C’est ainsi, il ne faut pas en prendre ombrage mais l’admettre et s’en délecter.

Et je le dis sans trembler, Finkielkraut est une des lumières de ce siècle balbutiant. Un phare qui ne cède aucune concession à l’époque, à la sainte modernité.

Il aime à citer d’autres auteurs, ce qui est un signe d’humilité ou de pédanterie, au choix (paradoxe du mot pédant, l’employer pour dénoncer une attitude c’est l’être), mais on préférerait parfois qu’il en produise des paraphrases pour le plaisir de goûter à ses propres mots.

Finky sait également se montrer très drôle avec une simple phrase : « au nom du onzième commandement « tu ne feras pas d’amalgame » ». Imparable !

Ce qui fait certainement de moi un être profondément réactionnaire, j’aime encore l’intelligence et celle-ci ne peut être un blanc-seing livré à l’air du temps mais un regard critique, préventif, une sorte de sagesse embryonnaire.

Pour conclure, un livre nécessaire et salutaire, que l’on partage ou non ses analyses. A titre personnel, je ne suis pas en adéquation avec sa pensée concernant Dieudonné et Finkielkraut devrait prendre garde des interdictions et des lynchages, de peur d’être le prochain.

La question juive et son articulation dans la société française est également très prégnante, prépondérante mais développée avec la sagacité de celui qui connaît son sujet et entrevoit une simili-vérité.

Dans son intermezzo Heidggérien, je n’ai pas bien saisi quelle était la différence entre l’être et l’étant, je m’échine à comprendre mais je ne serai probablement pas le seul.

A lire !








Samuel d’Halescourt

dimanche 8 novembre 2015

Quantum of Solace de Marc Forster (2008) Note : 7/20

Quantum of Solace de Marc Forster (2008)


La perdition de James Bond




Désastreux, pitoyable ! Là on se dit qu’il est loin le temps béni des Sean Connery et Roger Moore.

S’il s’agissait de faire une suite à Casino Royale, avec le peu de choses qu’il y avait à dire, un moyen-métrage aurait amplement suffi.

Des scènes d’action au montage elliptique qui confine à l’épileptique, plus digne d’un clip de transe psychédélique que d’une avancée narrative efficace et jubilatoire.

Quant à l’antagoniste, joué par Mathieu Amalric, il n’est pas crédible pour deux sous et particulièrement insipide. Il est plus ridicule qu’apeurant avec ses histoires de mainmises et de contrôles des réserves d’eau d’une partie de la Bolivie qui, sous couvert d’écologie, s’accapare les richesses naturelles.

Seule Olga Kurylenko tire son épingle du jeu et sauve ainsi quelques scènes du misérable dans lesquelles elle s’empêtre. Belle et transpirant le danger, elle nous réveille du cauchemar cinématographique qui défile sous nos yeux.

Ce film est une immense blague, certainement le plus mauvais de la saga et ça en fait des bobines boiteuses qui échappent de justesse à ce titre. Et puis Daniel Craig qui prouve malheureusement qu’il n’est pas un acteur de génie capable tel un Johnny Depp de sauver un film bancal sur ses seules épaules.

Pour conclure, un film mineur, au scénario microscopique, au montage inepte et à la réalisation de tâcheron.

Un seul bon point, c’est un James Bond ! Aussi mauvais soit-il, il s’inscrit dans une série, une longue suite d’œuvres éternelles et en est éclaboussé par capillarité ou contagion . Il devient le petit maillon d’une chaîne époustouflante et donc incontournable malgré son indicible nullité.








Samuel d’Halescourt

vendredi 6 novembre 2015

Septième message du Kindred : Transaction différée

Septième message du Kindred

Transaction différée


Dans la boutique de jeux vidéos, je pose la main sur la cinquième extension d’Héroïc Gobelin War. Floyd la testera et me dira si ça vaut le coup. Pendant le trajet qui nous ramènera sur Mars, je ne suis pas contre quelques séances de distractions dans une réalité toute virtuelle.

D’un pas décidé, d’une démarche que je crois et j’espère hiératique alors qu’elle n’est peut-être qu’erratique, je fais un saut à la pharmacie pour acheter deux boîtes d’amisulpride afin de contenir le démon.

Plus jeune, je pensais que mes différences objectives étaient l’expression de mon génie alors qu’elles n’étaient que banales schizophrénies.

Mes emplettes concentrées dans mon sac en bandoulière digne d’un étudiant attardé, je me rends avec diligence et alacrité au Nyarlathotep Club où m’attend Dridge.

Au fond de la salle, je prends possession d’une table et commande un double whisky irlandais. Musicalement, un vieux titre d’électro-épouvante des Last Vampires remplit le fond sonore. J’attaque la préface du Nietzsche que je viens de me payer en sirotant mon nectar.

Dix minutes s’écoulent ainsi avant que mon acheteur interrompe mes considérations philosophiques en posant son séant sur la banquette caca d’oie en face de moi.

  • Eewar, comment ça va ? me demande Dridge en me tendant la main.
  • Pas mal, et toi ? dis-je en lui serrant la pogne.
  • Désastreux ! on ma diagnostiqué le syndrome de Creepen. La maladie de Gaiä !
  • Merde, désolé pour toi vieux. T’as les crises et tout le toutime ?
  • Ouais, la totale ! Je vais devoir suivre le traitement et vivre sur Terre au moins six mois de l’année. Enfin y croupir plutôt ! Et Floyd ça va ?
  • Y se maintient. T’as le fric ?
  • Evidemment, sinon j’aurais commencé par ça !
  • Alors on fait ça où ?
  • Pas ici, c’est trop risqué. Sur Léda ! Un petit satellite qui est en ce moment à dix millions de kilomètres d’ici. Sur le caillou il y a un petit astromotel et je connais le patron, c’est un ami à moi. C’est du sûr !
  • OK, on fait ça quand ?
  • Dans exactement quarante huit heures à partir de maintenant !
  • Parfait, on y sera.
  • Je te paye un autre verre ?
  • Avec plaisir !


Je vous recontacte prochainement.



Samuel d’Halescourt

jeudi 5 novembre 2015

A l’est – Jean Gab’1 (2015) Note : 14/20

A l’est – Jean Gab’1 (2015)

L’errance est une soif d’aventure


Naïf, je vais partir du principe que Gab’1 est bien l’auteur de son livre, qu’il n’y a pas de co-auteur dissimulé, encore moins de nègre caché. Fort de cet axiome, commençons l’épanchement.

Gab’1 s’inscrit comme le nouveau Cizia Zykë, narrant ses péripéties de jeunesse avec une verve salutaire et jubilatoire. Faisant fi de la bienséance et des conventions, il raconte sans honte ce que certains rechigneraient à dévoiler de peur d’être salement jugés

Cette fraternité d’esprit et de trajectoire avec Zykë nous pousse à une interrogation : les apprentis gangsters sont-ils les derniers aventuriers de notre temps ? La réponse allant d’elle-même, le frisson ne pouvant faire l’économie du hors-la-loi.

On peut regretter dans le récit une redondance de termes argotiques comme mézigue ou coulange qui reviennent des dizaines de fois et procurent une saturation par la répétition. Néanmoins, ce style composé de mots qui prennent racine dans le métissage du langage de la rue est vraiment agréable. Une sorte de fusion entre la langue de Michel Audiard et celle de Frédéric Dard. Entre le Mexicain des tontons flingueurs et San Antonio. Par ce fait Gab’1 conforte l’idée qu’il est bel et bien un mec à l’ancienne, un homme en noir et blanc qui aurait troqué le costume pour une tenue cédant aux sirènes du Hip Hop.

La première partie est sympathique mais la deuxième, se déroulant à Chicago, est proprement stupéfiante. L’embrouille est au rendez-vous de chaque journée et les balles pleuvent. L’anarchie des gangs ethniques fait peser une ambiance de perpétuel état de guerre.

Pour conclure, une bonne petite autobiographie correctement romancée d’un homme qui a eu un début d’existence palpitant et criminel. Les tribulations d’une première génération de bandits nés sur le sol français issus d’une immigration africaine.

Les années de voyous de Gab’1 feraient une bonne fiction au cinéma à mi-chemin entre Borsalino et Menace to Society.





Samuel d’Halescourt

dimanche 1 novembre 2015

Souvenirs de jeux de rôles : 1 – Les premières parties

Souvenirs de jeux de rôles : 1 – Les premières parties


Tout commença au collège, en quatrième, dans ce qui devait être 1995. Cette année là, je rencontrai Boris qui était dans ma classe et qui pratiquait le jeu de rôle avec un certain Charles depuis deux ou trois ans déjà. Le fait qu’ils formaient un duo exclusif les amenait à d’étranges combinaisons rôlistiques comme être maître du jeu et joueur en même temps. Je parlai à Boris de ma passion pour la science-fiction et la fantaisie et cela ne tombant pas dans l’oreille d’un sourd, il me proposa assez vite une activité insolite avec son pote Charly un après-midi de vacances.

Je me rendis donc chez Bobo, dans un rendez-vous nimbé de mystère où une partie de Warhammer m’attendait (le scénario du livre de base). Charly me mis au parfum des premiers rudiments de l’activité : pas de gagnant, pas de perdant, le but est de s’amuser ; tu interprètes un personnage dans un monde imaginaire mais régulé et tu me dis ce que tu y fais. De cette première séance je ne garde le souvenir que d’une attaque de brigands dans la rue, qui nous menaçaient de leur bâton.

Cette histoire de bâton nous a fait beaucoup rire avec Boris, hilares de leur côté phallique, pardonnez-nous, nous étions au seuil de l’adolescence et puérilement obsédés. Le jeu était accompagné de nos premières cigarettes, à la fois transgressives et imitatrices, notre plaisir n’en n’était que décuplé.

L’après-midi s’acheva, je rentrai chez moi avec le sentiment de m’être bien amusé mais sans plus.

Le lendemain, même heure, nous remettions çà ; cette fois c’était Star Wars et toujours Charly aux manettes. Et c’est là qu’est arrivée la révélation. Je jouais un contrebandier et inspiré par ma passion prépubère du catch, je décidai d’administrer une descente du coude à un soldat de l’empire. J’enchaînai deux échecs critiques consécutivement et me brisai ledit coude sur une pierre alors qu’il retirait sa tête. Voilà c’est à ce moment précis que le virus s’est inoculé en moi et que j’ai passé dix ans de ma vie à ne faire que ça. Charles m’a raconté que pour lui l’élément déclencheur de l’addiction fut un marteau de guerre éclatant le crâne d’un crocodile dans le mythique Oeil Noir avec ses potes de Paris.

Boris m’a ensuite parlé de Donjons et Dragons, lui possédant le manuel des joueurs et Charles le guide du maître, il ne leur manquait plus que le bestiaire monstrueux pour s’y mettre. Ni une, ni deux, après les cours je me ruai au magasin de jouets pour l’acheter. 230 francs, c’était une somme pour moi, un véritable investissement. La semaine d’après nous commencions notre premier DD, 2ème édition, où mon personnage, Malak, est mort au bout de trois quart d’heure après avoir giflé par bravade notre commanditaire entouré de ses sbires. Je testais la cohérence du monde et appris que même dans un jeu de rôles des règles immuables subsistent.





Samuel d’Halescourt