Je crois au dieu du carnage !
Etonnant film de la part de
Polanski. Un exercice de style, un huis-clos mordant, la
confrontation de civilités qui s’effritent.
Deux couples New-Yorkais discutant
du fait que le fils des uns à briser deux dents au fils des autres
avant que le carnage, la rafale des reproches entre couple et
inter-couple ne démarre.
Par conséquent le film ne
commence vraiment que lorsque Kate Winslet vomit sur la table basse.
Jusqu’alors ce n’était qu’une mise en place, en situation, des
éléments qui permettront la déflagration quand les premiers verres
de whisky seront servis. Deshinibés, la bienséance s’estompant,
le jeu de massacre débutera, le ressentiment enfin libéré.
Les acteurs sont excellents. Il en
fallait de ce calibre là, de cette épaisseur pour faire tenir les
une heure et quart de palabres sur leurs huit épaules.
Chaque personnage est bien
travaillé, au caractère et aux attitudes uniques, avec une petite
préférence pour celui de Jodie Foster, caricature de bobo à New
York comme à Paris, qui se soucie davantage du sort des « nègres
du Soudan » (citation du film, je précise) qu’à celui de
son entourage direct et qui nous propose une joyeuse variation de
l’hystérie rageuse.
Une tentative de lever le voile
sur ces citoyens américains bien sous tous rapports, qui s’engluent
inévitablement dans une mer d’incompréhension.
Pour conclure, une œuvre sûrement
difficile à réaliser au vue des contraintes narratives qui pesaient
sur elle mais Polanski s’en sort bien et polit une nouvelle facette
du diamant cinématographique qu’il est. Un gamin défiguré, une
sombre histoire de hamster abandonné, un téléphone portable non
étanche, un séchoir et des fleurs ravagées, autant d’entrées
dans le giron d’un sublime carnage.
J’aurai finalement retenu deux
choses fondamentales de ce film : la puissance des non-dits de
la petite bourgeoisie occidentale et la valeur de vérité de
l’éthylisme.
Samuel d’Halescourt