mercredi 30 décembre 2015

Onzième message du Kindred : Menace douanière



Le soir venu, le vieux briscard se consacrait toujours à sa besogne. Un petit chariot à ses côtés, contenant tout le matériel du parfait petit mécano de l’espace, qu’il traînait avec difficulté.

  • Je n’en ai plus que pour une demi-heure ! me dit-il
  • Prenez votre temps ! Je veux que ce soit bien fait !

A ce moment précis, j’ai tourné la tête et vu débouler trois agents des douanes en même temps que la camionnette destinée à nous délester de notre tonne de pastèques.

  • Lieutenant Dmitri Spears ! me dit l’un d’eux en m’agitant son insigne sous le nez.
  • Que puis-je faire pour vous lieutenant ?
  • Me laisser fouiller votre charmant petit vaisseau en faisant preuve d’une collaboration des plus zélées !
  • Allez-y ! Je vous demanderai juste de pas déranger mon pote qui végète dans sa mousse !
  • Ça j’en serai seul juge ! Stayer, McJill, au boulot ! Retournez-moi tout ça !
  • Et on peut savoir ce que vous cherchez ?
  • Je sais pas : contrefaçon, drogue, armement illégal ? On peut trouver tout un tas de truc délictueux chez des gens immatriculés Pluton !

L’ancien continue sa réparation sans se soucier particulièrement de la pseudo-perquisition qui se déroule sous ses yeux.

Je sors mon paquet de Jupiter’s, allume une clope puis le tend vers Spears :

  • Une cigarette lieutenant ?
  • Pas de soudoiement ! me répond-il sèchement.
  • Comme vous voulez !

J’ai tiré une première taffe profonde pour me donner courage et assurance. Une deuxième uniquement pour le plaisir et consacrer la jubilation d’une certaine forme de fuite en avant.

Quand les limiers sont entrés dans ma caravane stellaire, j’ai aspiré une troisième bouffée et eu l’envie de m’écrouler sur un matelas rembourré de plumes de phœnix.




Je vous recontacte prochainement.








Samuel d’Halescourt

lundi 21 décembre 2015

Le Trône de Fer 11 – Les Sables de Dorne – George R.R. Martin (2005) Note : 14/20

Mais où est Tyrion Lannister ?




Le Trône de Fer commençait sur les chapeaux de roue avec le premier volume et sa suite « Le Donjon Rouge » avant de décliner, d’entamer une longue descente qualitative, avec quelques sursauts évidemment, jusqu’à ce présent ouvrage.

Largement consacré à Brienne, Cersei et Jaime alors que les personnages les plus passionnants et ceux dont on attend la progression narrative sont Tyrion, Arya Starck et Jon Snow.

Il faut dire la vérité, la saga est souvent excellente et trépidante mais il est des chapitres alambiqués et sibyllins où l’on est complètement perdu, ne sachant plus où nous nous trouvons et avec quel protagoniste nous ferraillons. Je tire d’ailleurs mon chapeau aux scénaristes de Game of Thrones qui eux arrivent à s’y retrouver et à donner une forme de cohérence à tout ça.

Cependant dans ce pur univers de fantasy médiévale, austère et ultra violent où l’on regrette parfois qu’il n’y ait pas plus de créatures surnaturelles (même si c’est un contresens avec le postulat de fantasy), on se laisse bercer par le flot des mots extrêmement bien choisis et en adéquation avec le décorum proposé.

Les dialogues sont souvent impeccables et correspondent aux personnages qui les envoient malgré une propension à la stérilité et à la lenteur sur l’avancement de l’intrigue.

Pour conclure, un tome honnête, inférieur aux précédents, à l’instar de « Le Chaos » où il ne se passait également pas grand chose. Martin a certes un certain génie mais on sent qu’il a eu du mal à l’écrire et qu’il a tendance à se reposer sur ses lauriers.

Déjà quatre mille pages du Trône de Fer et l’enthousiasme à découvrir les nouvelles péripéties des héros de Westeros est toujours intact, en espérant que le tome 12 sera de meilleure facture et retrouve la qualité des débuts.








Samuel d’Halescourt

dimanche 20 décembre 2015

Or Noir de Jean-jacques Annaud (2011) Note : 15/20

Or Noir de Jean-jacques Annaud (2011)


« Soyons sérieux, il est bibliothécaire, pour l’amour du ciel »



Un film de Jean-Jacques Annaud est toujours un plaisir, une forme profonde de délice, une joie extatique. Le seul réalisateur français qui, avec des moyens et des méthodes hollywoodiennes, est capable de produire un pur film d’auteur.

Celui-ci n’est pas un des meilleurs mais reste un cru excellent, entre Lawrence d’Arabie, Tintin au pays de l’or noir et le Diamant du Nil.

Une grande aventure dans l’Arabie des années trente quand les premiers puits de pétrole ont redistribué les gouvernances. Dans ce décor historique, il nous est proposé de suivre l’ascension d’un petit bibliothécaire, certes de sang royal, de l’insignifiance au contrôle de tout un royaume.

C’est une grande fresque à l’ancienne, pas une expérimentation du désert et de ce qui va avec le soleil, le vent et la soif comme dans Lawrence d’Arabie, mais une épopée où s’affrontent modernes et conservateurs.

Au niveau du jeu des acteurs, deux remarques, la prestation exceptionnelle d’Antonio Banderas et la présence magnétique de Freida Pinto.

Le film s’intéresse à un monde, une culture dont il présente une vision relativement honnête avec ses bassesses et ses grandeurs.

Tahar Rahim, quant à lui, n’est pas étincelant, il confine même au fade mais a le grand mérite d’avoir la gueule de l’emploi, crédible dans son rôle de petit intellectuel qui par les hasards de la vie se retrouve chef de guerre.

Pour conclure, une suite logique à la carrière positivement surdimensionnée d’Annaud où l’emphase et la juste prétention ont du style, de l’allure, suffisamment pour nous laisser expectatif devant la progression d’un rêve cinématographique.

La réincarnation de David Lean, le pétrole en plus mais avec la même conflictualité tribale. Annaud se devait de traiter cette Arabie islamique pour compléter sa collection de tableau qui tente d’appréhender l’ensemble de l’humanité.






Samuel d’Halescourt

samedi 19 décembre 2015

Dixième message du Kindred : Le repos des guerriers


J’ai refilé son deuxième cadeau à Floyd. Il n’était plus vraiment en état de développer une émotion alors il s’est contenté de sourire bêtement. Cinq minutes plus tard il reprenait son rôle de dragon avec une seule idée en tête, atteindre le prochain niveau. Bien au chaud dans sa mousse ergonomique, casque projecteur vissé sur l’occiput, manettes au poing, je ne le reverrai pas avant un bout de temps.

De mon côté, je me suis lu une cinquantaine de pages de mon « Généalogie de la morale » et puis je me suis endormi, à l’heure de la sieste, devant un documentaire qui tentait de faire le point sur les bienfaits de l’influence aliénigène.

Je suis sorti de ma torpeur éphémère en début de soirée, dans une heure géoconstante, avec un léger mal de crâne au niveau du front. De mon sommeil je me souviens qu’une baleine bleue essayait de me grignoter les doigts de pieds.

Dans le salon Floyd était sorti de sa cabine à duvet Nintendo pour se ravitailler en pizzas dont deux boîtes éventrées gisaient sur la table basse.

Nous échangeons quelques mots :

  • Alors ? je lui envoie.
  • 150ème !
  • Mortel !

Après quoi il repart se blottir dans sa mousse, rejoindre hypnotisé le ventre de maman, batailler sans relâche pour étendre sont territoire et son empire.

Je prends une bonne douche, réajuste ma crête et me rends au guichet de l’astroport pour régler nos deux journées de villégiature. J’en profite pour commander une bonne quantité de bouffe ainsi qu’un plein d’eau et d’oxygène, une autonomie assurée pour au moins un mois.


Je vous recontacte prochainement.




Samuel d’Halescourt

samedi 12 décembre 2015

Paul Verlaine - Stefan Zweig (2015) Note : 18/20

Paul Verlaine - Stefan Zweig (2015)

Elu prince des poètes en son temps


Un livre merveilleux composé de quatre parties, deux biographies de Paul Verlaine, l’une de jeunesse et l’autre plus tardive, un court texte sur Rimbaud puis conclut par trois poèmes, pour le coup mineurs, de Zweig.

Un grand romancier qui narre la vie tumultueuse d’un grand poète, cela ne peut déboucher que sur du magistral, une littérature soyeuse et élégante, du caviar dans une coupelle en or.

L’éloge démarre pourtant mal, Zweig affirme que ce qui caractérise le mieux Verlaine c’est la faiblesse, le manque de personnalité et l’absence de caractère. L’inverse complet de ce qu’était Rimbaud. Le pauvre Lélian tire avant tout son statut de poète maudit de cette description impitoyable.

Outre le style supérieur et complexe, on y apprend énormément de choses sur la vie de Verlaine. Les trois coups de feu qui visent Rimbaud, l’un des tirs le touchant superficiellement, ne supportant pas la séparation et qui lui vaudront quelques années de prison. Zweig nous indique qu’il s’est converti au catholicisme mais point de conversion, un simple retour à ses racines, à une ontologie enfouie. De ce moment il rejoint officiellement les rangs des poètes catholiques.

Il fera un autre séjour en prison après avoir frappé sa pauvre mère, la seule voulant encore bien de lui et prête à l’héberger. Après cela, ce sera la rue mais la reconnaissance de toute une génération

Pour conclure, un livre peut-être pour érudit mais tellement jouissif autant dans le contenu que dans la langue. Tous les amateurs des poèmes Saturniens trouveront ici un évangile selon saint-Zweig, un début d’éclaircissement sur une figure révérée et adulée par bon membre de marginaux romantiques dans l’acception étymologique du terme.

Enfin, je milite pour remettre au goût du jour cette vieille tradition et que soit élu de nouveau et dans l’instant un prince des poètes.




Samuel d’Halescourt

jeudi 10 décembre 2015

L’ordre et la morale de Mathieu Kassovitz (2011) Note : 16/20

L’ordre et la morale de Mathieu Kassovitz (2011)


« Ici c’est Kanakie »

Magnifique oeuvre, entre film de guerre et film d’assaut, très bien réalisé, presque virtuose où chaque plan est d’une richesse incroyable.

La trame fait partie de l’histoire de France moderne. Un groupe d’indépendantistes Kanak assaille une petite gendarmerie de campagne puis se constitue des otages qu’il retient captifs dans la grotte d’Ouvéa.

Ça apparaît comme le deuxième volet de la 317ème section de Pierre Schoendoerffer, n’ayant rien eu d’aussi réussi dans le genre pendant ce long laps temporel et on espère que dans vingt ou trente ans un autre grand cinéaste tricolore conclura le triptyque.

Le grain de l’image, la lumière, la contemplation en arrière plan d’une nature sauvage et luxuriante, tout fait penser à du Terence Malik inspiré, au sommet de son art.

Kassovitz s’était un peu perdu pendant sa parenthèse américaine, même si Gothika était plutôt bon, et nous revient avec une production bien française, un film objectif, correctement maîtrisé, doucement politique.

Une œuvre où le manichéisme n’est pas de mise, donnant la parole à toutes les parties, à chaque camp, indépendantistes comme agents du GIGN jusqu’au ministre de l’Outre-mer et finalement ne contentant personne, ce qui peut expliquer son relatif échec et que Kasso veuille enculer le cinéma français.

Pour conclure, un film brillant, tempéré, tout en nuance dans son approche où commençant par le massacre, le décompte des jours s’égrène, de J-10 au jour J, nous progressons vers un dénouement au sordide inéluctable.

Une tragédie estampillée année 80 sur fond d’élection présidentielle avec la séquence d’un assaut final proprement ébouriffante.












Samuel d’Halescourt.

lundi 7 décembre 2015

Neuvième message du Kindred : La danse de l’inflation

Neuvième message du Kindred


La danse de l’inflation




Je rejoins l’astroport du dôme Cherryh, traverse la flotte des vaisseaux interplanétaires jusqu’à l’emplacement du Kindred.

Sur place, le vieux noir à la barbe blanchie pointe sa clef de seize en direction du visage de Floyd :

  • Arrête de me faire chier mon gars ! J’en ai maté des plus gros que toi !
  • Hola ! qu’est-ce qui se passe ? j’interviens en contractant l’intégralité des rides de mon front.
  • Ce vieux con veut nous soutirer 8000 HD ! dit Floyd en planant à moitié.
  • C’est ce que ça coûte ! renchérit le mécanicien.
  • Bon Floyd je prends le relais ! Va te taper un bang de ma part ! déclarais-je en lui lançant le sachet rempli d’herbe que je viens d’acheter.

Il s’exécute en maugréant d’une démarche digne d’un pingouin qui aurait dix kilos de chibres à déplacer. Pour monter la rampe d’accès au vaisseau ça lui prendra le temps qu’il faut pour courir un 400 mètres haies.

  • Bon ! je dis à l’ancêtre. C’est quoi cette histoire de 8000 HD ? Vous voulez nous arnaquer ?
  • C’est ce que j’essayais d’expliquer au gros lard ! L’injecteur est nase et des comme ça on en trouve plus sur le marché, je vais devoir bidouiller un modèle plus récent, beaucoup plus cher et l’adapter. C’est quand même pas de ma faute si vous vous plaisez à jouer les antiquaires de l’espace !
  • OK ! Je suis prêt à payer mais je veux que demain matin on soit en état de décoller et en toute sécurité.
  • Je vais faire de mon mieux.
  • J’en suis ravi !



Je vous recontacte prochainement.








Samuel d’Halescourt


mardi 1 décembre 2015

Cheval de guerre de Steven Spielberg (2011) Note : 18/20

Cheval de guerre de Steven Spielberg (2011)


Un erratique voyage équestre




Un Spielberg confidentiel qui a fait peu de bruit mais du grand Spielberg, spectaculaire, épique, élégiaque.

Après « Il faut sauver le soldat Ryan », « 1941 » ou encore « La liste de Schindler », il traite enfin la première guerre mondiale et avec quelle maestria. Ne lui reste plus qu’à évoquer le Vietnam et sa couverture de la guerre au cinéma sera complète, totale.

L’épopée d’un canasson, de sa naissance, son dressage dans une modeste ferme anglaise, son rôle dans la grande guerre et son retour dans l’enclos originel. Un cheval autour duquel gravitera toute une panoplie de personnages fascinés par cette bête exceptionnelle qui rivaliseront de bienveillance à son égard. Le point culminant étant sa prise au piège par des barbelés au milieu des tranchées où un impalpable et immense sentiment de commisération nous saisit.

La campagne anglaise est magnifiquement rendue, avec ses couleurs, son odeur, sa dureté, l’effroyable combat des fermiers d’avant la modernité pour leur survie.

Et puis Niels Arestrup surgissant, apparaissant tel un hobbit dans son bucolique environnement, sa maison chaleureuse, son bon sens et sa bonhomie paysanne.

Pour conclure, un film maîtrisé, superbement réalisé, qui traite directement avec le myocarde, fait vibrer une corde sensible, remontant directement de l’enfance. Un film de gosse pour adulte, dépourvu d’amnésie, un croc-blanc remastérisé, l’anodin au milieu de la grande histoire, une certaine forme de pureté mise en image, la plus belle facette de l’humanité dans un film consacré à un bourrin, à en verser des larmes de plusieurs hectolitres.









Samuel d’Halescourt

lundi 30 novembre 2015

2084 La fin du monde – Boualem Sansal (2015) Note : 14/20

2084 La fin du monde – Boualem Sansal (2015)

Allégorie en forme de sonnette d’alarme


Les deux premiers tiers du bouquin sont excellents, présentation du monde et son appréhension par le personnage principal, mais malheureusement le dernier tiers, les cents dernières pages paraissent inutiles tant l’essentiel a été dit dans le reste du roman.

Si ce n’était une projection, une prospective voire une allégorie, on parlerait, dans un langage purement S-F, de planet opéra, tous les éléments y étant réunis.

L’action se déroule dans un univers que je qualifierais de techno-médiéval que l’on pourrait aisément comparer avec celui de la légende d’Hawkmoon de Moorcock, obscurantiste et rétrograde.

La langue est belle, paradoxalement peut-être un peu trop belle pour de l’anticipation. Etre trop lettré ou trop savant sémantiquement est-il un handicap pour ce genre de littérature ? Le plaisir des mots peut-il prendre le pas sur l’immersion souhaitée ?

Boualemn Sansal crée un néologisme judicieux pour ériger et étoffer son futur dystopique, le burnikab, mélange de burka et de nikab, éclairant d’évidence l’objet de sa critique acerbe.

Dans 1984, Orwell s’est inspiré des deux grands totalitarismes du XXème siècle. Dans 2084, Sansal pousse le dernier en date jusqu’à sa logique ultime. Il en change le dieu et le prophète afin d’appuyer plus pertinemment encore sa démonstration.

Pour conclure, un livre malheureusement pas au niveau du sujet fondamental dont il s’empare. La description des rouages du monde et les citations du Gkabul sont intéressantes mais le récit en lui-même, pourtant prometteur, s’empêtre dans le rien, dans un manque d’imagination qui fait cruellement défaut.

Tous les noms des personnages de Sansal ne comportent que trois lettres : Ati, Koa, Nas, Abi etc. et cela a forcément un sens. Certainement une façon de renforcer le caractère tyrannique du futur qu’il dépeint, où même les noms sont strictement encadrés par une norme délirante considérée comme divine.





Samuel d’Halescourt

dimanche 29 novembre 2015

Top 10 des meilleurs sagas, séries ou cycles de bandes-dessinées (la franco-belge, la nôtre)

Top 10 des meilleurs sagas, séries ou cycles de bandes-dessinées (la franco-belge, la nôtre)




Comme d’habitude, je glisse ma lapalissade et précise qu’il s’agit de celles que j’ai lues, ne pouvant classer celles dont j’ignore le contenu.




  1. - HK (Morvan-Herault)
(le 1er cycle et le 2ème avorté)


  1. - Les chroniques de la lune noire (Froideval-Ledroit-Pontet-Angleraud)
(et ses arcanes)


  1. - Lanfeust de Troy (Arleston-Tarquin)


  1. - Krän (Eric Hérenguel)


  1. - Les Technopères (Jodorowsky-Janjetov-Beltran)


  1. - Ranx (Liberatore-Tamburini)

  1. - Lanfeust des étoiles (Arleston-Tarquin)


  1. - Sha (Mills-Ledroit)


  1. - Thorgal (Rosinski-Van Hamme)

  1. - Golden city (Pecqueur-Malfin)






Samuel d’Halescourt

mercredi 25 novembre 2015

Huitième message du Kindred : Le songe d’une nymphe en bas résille

Huitième message du Kindred


Le songe d’une nymphe en bas résille




Dridge et moi avons continué à discuter pendant près d’une demi-heure. Evoquant nos combattants préférés du MHB, avant tout les poids méga lourds, les plus de deux cents kilos, la catégorie reine où orques, cyclopes, minautores et semi-géants tiennent le haut du pavé.

Puis nous avons évoqué les magouilles du gouvernement, deux sujets dénués de tout rapport si ce n’est celui de passionner les foules. Dridge et ses fines dreadlocks était intarissables sur le second. Sa hargne et sa colère légèrement feinte étaient particulièrement roboratives. Le président de la fédération, Jacob Cissé, était rhabillé pour l’hiver.


Sur le chemin du retour, je fais un détour par le quartier chaud dans l’unique but de me rincer les mirettes. Enfin quartier, deux rues perpendiculaires qui, vues du ciel, formeraient la croix du Christ. Ça n’a rien de glauque, l’endroit est très éclairé et plutôt salubre. La faune qui s’y concentre échappe à toute notion de dangerosité ou de climat patibulaire. Un décorum sain et aseptisé.

Je suis interrompu dans ma déambulation platonique par une rabatteuse qui m’alpague véhémentement. Elle me sort un baratin automatique, des tu verras, tu seras pas déçu, c’est la chance de ta vie, une possibilité de titiller le nirvana, l’occasion d’épaissir ta virilité.

Sa logorrhée est tellement bien rodée que je me laisse séduire. Je monte avec une des filles de l’établissement. Une petite blonde à la coupe asymétrique, long d’un côté, rasé de l’autre, à laquelle il manque deux doigts à la main droite.

Les promesses de la mama-san n’ont pas été tenues. Je n’ai rien vu du tout, j’ai joui assez rapidement dans le soubassement de la frêle Pémala en lâchant un léger râlement inaudible. Malgré l’apaisement de l’éjaculation, je restai sur un goût d’inachevé, l’humeur faussement perturbée. Stabilisé depuis quelques années, je n’ai à peine senti les embryons de culpabilité et de désespoir poindre.

J’ai allongé le fric et je suis reparti comme j’étais venu, le fardeau en moins !

Je vous recontacte prochainement.








Samuel d’Halescourt

dimanche 22 novembre 2015

Les Pantins cosmiques – Philip K. Dick (1957) Note : 14/20

Les Pantins cosmiques – Philip K. Dick (1957)


Roman de troisième catégorie




Livre particulier de la part du Dick, le chaînon manquant entre l’œuvre de HP Lovecraft et celle de Stephen King.

Ted Barton revient dans sa petite bourgade natale où personne ne se souvient de lui et où tout a changé. Il apprend que tout ceci est dû à un combat ancestral que se livrent deux divinités cosmiques, Ahriman, le mauvais et Ormadz, le bon.

A l’aide d’un vieil homme qui n’a pas oublié le monde d’avant et grâce à une de ses inventions, il va s’employer à redonner naissance au bon ordre des choses.

Le conflit entre les deux entités, les deux grands anciens pseudo-lovecraftiens, est ce qui semble le plus intéressant dans ce court roman. Leur évocation a quelque chose de vertigineux, grandissime et fascinant.

La compagne du héros, figure féminine du roman, est pour le moins très Dickienne. Elle évince Ted parce que leur plan, leur désir divergent et lui lance un ultimatum qu’il ne pourra satisfaire, trop absorbé par son obsession de comprendre ce qui est arrivé à sa ville.

On est plongé dans l’atmosphère des petites villes américaines, au décor mimétique, entourées de nature, propices au déferlement d’évènements paranormaux. Notre subconscient en est tellement abreuvé qu’il est comme chez lui.

Après ses livres de science-fiction, majoritaire, ses romans classiques de « vraie littérature », voici une nouvelle catégorie avec un représentant unique.

Pour conclure, un bouquin mineur, peut-être le plus mauvais de la petite trentaine que j’ai dans les pattes du visionnaire Philip K. Dick. Ma passion pour cet auteur n’est plus à prouver, mais l’objectivité nous pousse à admettre que « Les Pantins cosmiques » occupe la queue du peloton. Donc décevant mais reste néanmoins une certaine tenue, un peu de génie qui s’infiltre, de façon éparse, ici et là, des fulgurances disséminées qui rattrapent la globalité.










Samuel d’Halescourt




mardi 17 novembre 2015

Une bougie sur le gâteau du Kindred




Merci à tous ceux qui suivent assidûment le flot des publications et à ceux qui sont venus jeter un petit coup d’œil au détour d’un clic.

Le Kindred et ses vicissitudes fêtent leur premier anniversaire et titubent dangereusement.

La seconde saison sera encore plus riche, performante et trépidante.

Salutations cosmiques.











Samuel d’Halescourt

dimanche 15 novembre 2015

Deuxième antienne du Kindred : Les trompettes mythologiques

Deuxième antienne du Kindred
Les trompettes mythologiques


Créatures nées du génie humain, d’une génétique aux possibilités illimitées, dans le folklore des siècles passés, oublié puis ressuscité.

Monstres ou minorités mythologiques suivant son bord, son œilleton. Des centaines de races, compatibles à la reproduction avec l’homme, aboutissant à des demis et à des mulâtres. Certains sont au monde à plusieurs millions, d’autres à seulement quelques milliers. Les nains et leur royaume en Norvège, les elfes blancs autour de la mer Caspienne, les elfes noirs s’emparant d’un tiers du Gabon, les orques considérant la France comme la terre promise, les gobelins et leurs deux foyers : Japon et Canada. Et le reste, trop peu nombreux pour se constituer en nation, éparpillé aux quatre coins des plus gigantesques mégalopoles.

Scientifiques acharnés répondant à la maxime qui veut que tout ce qu’il sera possible de faire, l’humanité le fera. Les enfants de Tolkien, des jeux de rôles et du populaire, ils avancent à vue, se construisant au débotté leurs idiosyncrasiques paradigmes.

Le cinéma s’en frotte les mains, les films de fantasy écartent déguisement et synthèse pour de la chair mobile et concrète.

Méta-humanoïdes, sources de fantasmagories et de surréalismes dans une réalité jusque là empreinte de tristesse, d’une espèce qui se regardait le nombril.

Les partis et mouvements hostiles sont advenus défenseurs de la pureté du génome, du Sapiens tout puissant comme à l’origine ; rien d’inquiétant, juste l’expression d’atavique protection, le repoussement des menaces pour l’entité première.
Et pourtant, l’humanité et ses simulacres folkloriques doivent se tendre la main et percer ensemble les secrets d’un univers par trop abscons.




Samuel d’Halescourt

samedi 14 novembre 2015

Mortel transfert de Jean-Jacques Beineix (2001) Note : 15/20

Mortel transfert de Jean-Jacques Beineix (2001)

« Et le Jack Russel en plus ! »


Beineix livre un ultime film, du moins considéré comme tel en ce mois de novembre 2015. Peut-être s’est-il lui-même mis en retrait et éloigné du cinéma ou est-ce les producteurs, profession composée très largement d’opportunistes cupides, qui n’ont pas le courage et l’amour de cet art suffisant pour le produire ?

Si la deuxième hypothèse est vraie, ils prouveraient par-là qu’ils n’aiment pas le cinéma français et leurs démiurgiques sentinelles, méritant ainsi notre mépris, notre crachat !

Tout est déjà contenu dans la scène d’ouverture. Jean-Hugues Anglade, psychanalyste que l’on devine psychiatre de formation par le fait qu’il délivre, à un moment donné, une ordonnance et qu’il évoque ses études de médecine, suit lui-même une analyse chez un confrère, Robert Hirsh. Dans le cabinet se trouve un tableau vénitien où des hommes déguisés et masqués regardent la rue. C’est l’annonce des aventures qui attendent Anglade, les faux-semblants, la quête initiatique, la perdition et puis la renaissance.

Beineix fait son Kubrick et inscrit son Mortel transfert comme le Eyes Wide Shut français.

C’est une étude sur la paranoïa qui peut s’installer chez l’individu lorsque l’on n’a pas l’esprit tranquille, que la culpabilité, réelle ou artificielle, pèse comme une masse et pousse au délire.

Pour conclure, un film merveilleux, sombre mais non dénué d’humour où le fétichisme se confond avec l’avarice. L’ambiance y est parfois lourde et malsaine, semblable au téléfilm érotique du dimanche soir d’M6 que nous regardions jeunot.

Il faut préciser qu’Yves Rénier est excellent dans les quelques scènes que lui octroie son personnage dans un minuscule second rôle. Il y est intense et intimidant.

Une cavalcade dans un Paris obscur où tout paraît étrange, entre rêve et cauchemar.




Samuel d’Halescourt

mardi 10 novembre 2015

La seule exactitude – Alain Finkielkraut (2015) Note : 16/20

La seule exactitude – Alain Finkielkraut (2015)


Un flingue avec un nœud papillon




Autant annoncer la couleur, ce livre m’a régalé. Une accumulation de courts chapitres qui traitent de l’actualité de ces deux dernières années où Finky délivre ses sublimes exaspérations, son divin accablement.


Il me semble que dans les années soixante et soixante-dix, les philosophes les plus intéressants étaient principalement de gauche. Aujourd’hui, les intellectuels les plus passionnant sont quasiment tous classés à droite. C’est ainsi, il ne faut pas en prendre ombrage mais l’admettre et s’en délecter.

Et je le dis sans trembler, Finkielkraut est une des lumières de ce siècle balbutiant. Un phare qui ne cède aucune concession à l’époque, à la sainte modernité.

Il aime à citer d’autres auteurs, ce qui est un signe d’humilité ou de pédanterie, au choix (paradoxe du mot pédant, l’employer pour dénoncer une attitude c’est l’être), mais on préférerait parfois qu’il en produise des paraphrases pour le plaisir de goûter à ses propres mots.

Finky sait également se montrer très drôle avec une simple phrase : « au nom du onzième commandement « tu ne feras pas d’amalgame » ». Imparable !

Ce qui fait certainement de moi un être profondément réactionnaire, j’aime encore l’intelligence et celle-ci ne peut être un blanc-seing livré à l’air du temps mais un regard critique, préventif, une sorte de sagesse embryonnaire.

Pour conclure, un livre nécessaire et salutaire, que l’on partage ou non ses analyses. A titre personnel, je ne suis pas en adéquation avec sa pensée concernant Dieudonné et Finkielkraut devrait prendre garde des interdictions et des lynchages, de peur d’être le prochain.

La question juive et son articulation dans la société française est également très prégnante, prépondérante mais développée avec la sagacité de celui qui connaît son sujet et entrevoit une simili-vérité.

Dans son intermezzo Heidggérien, je n’ai pas bien saisi quelle était la différence entre l’être et l’étant, je m’échine à comprendre mais je ne serai probablement pas le seul.

A lire !








Samuel d’Halescourt

dimanche 8 novembre 2015

Quantum of Solace de Marc Forster (2008) Note : 7/20

Quantum of Solace de Marc Forster (2008)


La perdition de James Bond




Désastreux, pitoyable ! Là on se dit qu’il est loin le temps béni des Sean Connery et Roger Moore.

S’il s’agissait de faire une suite à Casino Royale, avec le peu de choses qu’il y avait à dire, un moyen-métrage aurait amplement suffi.

Des scènes d’action au montage elliptique qui confine à l’épileptique, plus digne d’un clip de transe psychédélique que d’une avancée narrative efficace et jubilatoire.

Quant à l’antagoniste, joué par Mathieu Amalric, il n’est pas crédible pour deux sous et particulièrement insipide. Il est plus ridicule qu’apeurant avec ses histoires de mainmises et de contrôles des réserves d’eau d’une partie de la Bolivie qui, sous couvert d’écologie, s’accapare les richesses naturelles.

Seule Olga Kurylenko tire son épingle du jeu et sauve ainsi quelques scènes du misérable dans lesquelles elle s’empêtre. Belle et transpirant le danger, elle nous réveille du cauchemar cinématographique qui défile sous nos yeux.

Ce film est une immense blague, certainement le plus mauvais de la saga et ça en fait des bobines boiteuses qui échappent de justesse à ce titre. Et puis Daniel Craig qui prouve malheureusement qu’il n’est pas un acteur de génie capable tel un Johnny Depp de sauver un film bancal sur ses seules épaules.

Pour conclure, un film mineur, au scénario microscopique, au montage inepte et à la réalisation de tâcheron.

Un seul bon point, c’est un James Bond ! Aussi mauvais soit-il, il s’inscrit dans une série, une longue suite d’œuvres éternelles et en est éclaboussé par capillarité ou contagion . Il devient le petit maillon d’une chaîne époustouflante et donc incontournable malgré son indicible nullité.








Samuel d’Halescourt

vendredi 6 novembre 2015

Septième message du Kindred : Transaction différée

Septième message du Kindred

Transaction différée


Dans la boutique de jeux vidéos, je pose la main sur la cinquième extension d’Héroïc Gobelin War. Floyd la testera et me dira si ça vaut le coup. Pendant le trajet qui nous ramènera sur Mars, je ne suis pas contre quelques séances de distractions dans une réalité toute virtuelle.

D’un pas décidé, d’une démarche que je crois et j’espère hiératique alors qu’elle n’est peut-être qu’erratique, je fais un saut à la pharmacie pour acheter deux boîtes d’amisulpride afin de contenir le démon.

Plus jeune, je pensais que mes différences objectives étaient l’expression de mon génie alors qu’elles n’étaient que banales schizophrénies.

Mes emplettes concentrées dans mon sac en bandoulière digne d’un étudiant attardé, je me rends avec diligence et alacrité au Nyarlathotep Club où m’attend Dridge.

Au fond de la salle, je prends possession d’une table et commande un double whisky irlandais. Musicalement, un vieux titre d’électro-épouvante des Last Vampires remplit le fond sonore. J’attaque la préface du Nietzsche que je viens de me payer en sirotant mon nectar.

Dix minutes s’écoulent ainsi avant que mon acheteur interrompe mes considérations philosophiques en posant son séant sur la banquette caca d’oie en face de moi.

  • Eewar, comment ça va ? me demande Dridge en me tendant la main.
  • Pas mal, et toi ? dis-je en lui serrant la pogne.
  • Désastreux ! on ma diagnostiqué le syndrome de Creepen. La maladie de Gaiä !
  • Merde, désolé pour toi vieux. T’as les crises et tout le toutime ?
  • Ouais, la totale ! Je vais devoir suivre le traitement et vivre sur Terre au moins six mois de l’année. Enfin y croupir plutôt ! Et Floyd ça va ?
  • Y se maintient. T’as le fric ?
  • Evidemment, sinon j’aurais commencé par ça !
  • Alors on fait ça où ?
  • Pas ici, c’est trop risqué. Sur Léda ! Un petit satellite qui est en ce moment à dix millions de kilomètres d’ici. Sur le caillou il y a un petit astromotel et je connais le patron, c’est un ami à moi. C’est du sûr !
  • OK, on fait ça quand ?
  • Dans exactement quarante huit heures à partir de maintenant !
  • Parfait, on y sera.
  • Je te paye un autre verre ?
  • Avec plaisir !


Je vous recontacte prochainement.



Samuel d’Halescourt

jeudi 5 novembre 2015

A l’est – Jean Gab’1 (2015) Note : 14/20

A l’est – Jean Gab’1 (2015)

L’errance est une soif d’aventure


Naïf, je vais partir du principe que Gab’1 est bien l’auteur de son livre, qu’il n’y a pas de co-auteur dissimulé, encore moins de nègre caché. Fort de cet axiome, commençons l’épanchement.

Gab’1 s’inscrit comme le nouveau Cizia Zykë, narrant ses péripéties de jeunesse avec une verve salutaire et jubilatoire. Faisant fi de la bienséance et des conventions, il raconte sans honte ce que certains rechigneraient à dévoiler de peur d’être salement jugés

Cette fraternité d’esprit et de trajectoire avec Zykë nous pousse à une interrogation : les apprentis gangsters sont-ils les derniers aventuriers de notre temps ? La réponse allant d’elle-même, le frisson ne pouvant faire l’économie du hors-la-loi.

On peut regretter dans le récit une redondance de termes argotiques comme mézigue ou coulange qui reviennent des dizaines de fois et procurent une saturation par la répétition. Néanmoins, ce style composé de mots qui prennent racine dans le métissage du langage de la rue est vraiment agréable. Une sorte de fusion entre la langue de Michel Audiard et celle de Frédéric Dard. Entre le Mexicain des tontons flingueurs et San Antonio. Par ce fait Gab’1 conforte l’idée qu’il est bel et bien un mec à l’ancienne, un homme en noir et blanc qui aurait troqué le costume pour une tenue cédant aux sirènes du Hip Hop.

La première partie est sympathique mais la deuxième, se déroulant à Chicago, est proprement stupéfiante. L’embrouille est au rendez-vous de chaque journée et les balles pleuvent. L’anarchie des gangs ethniques fait peser une ambiance de perpétuel état de guerre.

Pour conclure, une bonne petite autobiographie correctement romancée d’un homme qui a eu un début d’existence palpitant et criminel. Les tribulations d’une première génération de bandits nés sur le sol français issus d’une immigration africaine.

Les années de voyous de Gab’1 feraient une bonne fiction au cinéma à mi-chemin entre Borsalino et Menace to Society.





Samuel d’Halescourt

dimanche 1 novembre 2015

Souvenirs de jeux de rôles : 1 – Les premières parties

Souvenirs de jeux de rôles : 1 – Les premières parties


Tout commença au collège, en quatrième, dans ce qui devait être 1995. Cette année là, je rencontrai Boris qui était dans ma classe et qui pratiquait le jeu de rôle avec un certain Charles depuis deux ou trois ans déjà. Le fait qu’ils formaient un duo exclusif les amenait à d’étranges combinaisons rôlistiques comme être maître du jeu et joueur en même temps. Je parlai à Boris de ma passion pour la science-fiction et la fantaisie et cela ne tombant pas dans l’oreille d’un sourd, il me proposa assez vite une activité insolite avec son pote Charly un après-midi de vacances.

Je me rendis donc chez Bobo, dans un rendez-vous nimbé de mystère où une partie de Warhammer m’attendait (le scénario du livre de base). Charly me mis au parfum des premiers rudiments de l’activité : pas de gagnant, pas de perdant, le but est de s’amuser ; tu interprètes un personnage dans un monde imaginaire mais régulé et tu me dis ce que tu y fais. De cette première séance je ne garde le souvenir que d’une attaque de brigands dans la rue, qui nous menaçaient de leur bâton.

Cette histoire de bâton nous a fait beaucoup rire avec Boris, hilares de leur côté phallique, pardonnez-nous, nous étions au seuil de l’adolescence et puérilement obsédés. Le jeu était accompagné de nos premières cigarettes, à la fois transgressives et imitatrices, notre plaisir n’en n’était que décuplé.

L’après-midi s’acheva, je rentrai chez moi avec le sentiment de m’être bien amusé mais sans plus.

Le lendemain, même heure, nous remettions çà ; cette fois c’était Star Wars et toujours Charly aux manettes. Et c’est là qu’est arrivée la révélation. Je jouais un contrebandier et inspiré par ma passion prépubère du catch, je décidai d’administrer une descente du coude à un soldat de l’empire. J’enchaînai deux échecs critiques consécutivement et me brisai ledit coude sur une pierre alors qu’il retirait sa tête. Voilà c’est à ce moment précis que le virus s’est inoculé en moi et que j’ai passé dix ans de ma vie à ne faire que ça. Charles m’a raconté que pour lui l’élément déclencheur de l’addiction fut un marteau de guerre éclatant le crâne d’un crocodile dans le mythique Oeil Noir avec ses potes de Paris.

Boris m’a ensuite parlé de Donjons et Dragons, lui possédant le manuel des joueurs et Charles le guide du maître, il ne leur manquait plus que le bestiaire monstrueux pour s’y mettre. Ni une, ni deux, après les cours je me ruai au magasin de jouets pour l’acheter. 230 francs, c’était une somme pour moi, un véritable investissement. La semaine d’après nous commencions notre premier DD, 2ème édition, où mon personnage, Malak, est mort au bout de trois quart d’heure après avoir giflé par bravade notre commanditaire entouré de ses sbires. Je testais la cohérence du monde et appris que même dans un jeu de rôles des règles immuables subsistent.





Samuel d’Halescourt

mardi 27 octobre 2015

Casino Royale de Martin Campbell (2006) Note : 16/20

Casino Royale de Martin Campbell        (2006)

Ellipsis


La nouvelle ère bondienne, incarnée par Daniel Craig, s’ouvre avec maestria, surfant sur les codes cinématographiques du nouveau millénaire. La réinvention talentueuse d’un mythe, la réadaptation brillante d’une œuvre originelle, d’un socle imaginé par Ian Fleming.

Indéniablement, un grand James Bond, au scénario fouillé, imprévisible et surpuissant. Une réalisation virtuose et visionnaire où une partie de poker n’a jamais été aussi bien filmée. Elle rompt en ceci du dernier des Brosnam par une véritable maîtrise au service de la narration.

Les deux James Bond girls sont parfaites, Caterina Murino et Eva Green, conjuguant beauté et charisme (pas du niveau de Barbara Bach, n’exagérons rien) font étinceler, briller 007 d’une décharge communicative, d’une grâce engendrée par leur présence.

Le personnage du chiffre est particulièrement intéressant et impeccablement interprété (par Mads Mikkelsen), lui qui organise des attentats terroristes pour le compte de commanditaires et de surcroît joue en bourse la chute des compagnies qu’il vise. On comprend d’ailleurs qu’il avait anticipé le 11 septembre et fait un paquet de pognons. Etrange que les chiens de garde de la réalité vraie et officielle, toujours prompts à pourfendre ce qu’ils nomment la théorie du complot, ne s’en soient pas offusqués. Sûrement occupés à fouetter d’autres chats.

Pour conclure, un très bon film qui respecte la tradition tout en renouvelant avec brio le concept. L’inauguration du James Bond 2.0 connecté aux désirs visuels de l’époque. Pas de recyclage, de l’inédit et des avancées qui gratifient par sa pertinence le cerveau reptilien du spectateur.

A noter le troisième rôle de notre Simon Abkarian national qui nous fait plaisir en nous offrant une belle tête de méchant.

Les scènes d’actions, dont on pourrait subir la surdose dans ce type de film, sont bien tournées et surtout correctement distillées, juste ce qu’il faut. Long-métrage qui fait honneur à la catégorie espionnage.





Samuel d’Halescourt

samedi 24 octobre 2015

Sixième message du Kindred : De l’herbe et des livres

Sixième message du Kindred


De l’herbe et des livres




Je me dis que les petits gris ne peuvent s’empêcher d’entrevoir le monde par le prisme de celui qui l’aura le plus gros. Finalement chacun son aliénation. Les hominidés du sérail solaire en sont encore à celui qui l’aura la plus grosse.

Le centre ville m’ouvre les bras, pointant à la verticale ses monuments abracadabrantesques, tordus et colorés. Je m’arrête devant une borne civique et paye 10 HD pour avoir le droit de fumer une clope dans la rue. En grillant ma Jupiter’s, je flâne devant des boutiques en tout genre : armurerie, vidéoludisme, robotique, pharmacie ou autre caviste.

Je fais halte dans un débit de cannabis pour acheter dix grammes de Zelazny à Floyd. Dans la fédération, la vente de haschisch est légale à partir du moment où le taux de THC ne dépasse pas 17. Au-delà c’est le marché noir, la filière parallèle.

Après quoi, je m’arrête chez un bouquiniste, ces gardiens de la pensée non numérisés, ces exploitants de la tradition où le rayon ésotérisme s’est confondu avec le général. Le livre est un résistant, le rescapé de toutes les révolutions, réfractaire à toute évolution. La texture du carton de la couverture, l’odeur du papier, le chant des pages que l’on feuillette. Tout ceci est irremplaçable et ça ne s’explique pas. Une nostalgie, un sens de la transmission, la connexion spirituelle avec les générations qui nous ont précédés. Quelque chose d’intrinsèque à l’homme qui le rend dépendant et attaché à un support matériel de l’écrit. Mes entrailles m’en livrent le constat.

Je sors de la boutique avec une édition de généalogie de la morale de Nietzsche sous le bras préfacée par Zazé Mobb, la grande théoricienne du néo-individualisme, de l’eschatologie et des finalités alternées. Mon amour intellectuel.

Je vous recontacte prochainement.










Samuel d’Halescourt

mercredi 21 octobre 2015

Viscéral – Rachid Djaïdani (2007) Note : 13/20

Viscéral – Rachid Djaïdani (2007)


Théorème sur l’impossibilité de s’élever




Je me souviens avec émotion de « boumkoeur », son premier livre, que j’avais lu en fond de classe pendant les cours au lycée. Et puis « mon nerf », son deuxième, était assez enthousiasmant, bien écrit et original, du moins par le souvenir que j’en garde.

Quant à celui-là, donc son troisième, il me laisse un goût de laisser-aller et de facilité. L’histoire est intéressante voire prenante plus on se rapproche de la fin mais le style est décevant, entrelardé de comparaisons plus souvent dignes d’un rappeur amateur que d’un écrivain solide et crédible ; même si on se prend d’affection pour Liés et Shéhérazade, les deux protagonistes principaux de cette fable urbaine, cette tragédie bitumeuse, ce conte à la sauce banlieue.

Cela ressemble furieusement au scénario d’un film qu’il n’a pas réussi à monter et qu’après moult tentatives, il se serait décidé à en faire un roman afin que ses personnages vivent d’une façon ou d’une autre.

Chacun des titres des chapitres commence par « à l’heure », une manière plus ou moins subtile d’affirmer que l’on est dans un récit basé sur la temporalité et la coïncidence. Le temps fait ici figure de destin, tout s’imbrique, chaque rencontre est un prétexte au dénouement final.

Pour conclure, un livre mineur, jetable ou échangeable s’il faut être sévère.

Un roman de gare des zones périphériques où le style de Djaïdani a le cul entre deux chaises, hésitant en permanence entre classicisme et renouveau formel.

Malgré tout une certaine douceur perceptible émane du récit, dissimulée au milieu d’une violence inhérente à l’environnement, l’auteur nous dit que la pureté, celle de l’âme, est encore possible. Bonne petite histoire mais au traitement poussif, sans dimension, prise au piège par la petitesse morale des personnages secondaires, archétypes de jeunes de quartier qui ne cessent de vaciller.

Le titre du bouquin ne tient pas ses promesses, ici rien de viscéral !







Samuel d’Halescourt

vendredi 16 octobre 2015

Conversations d’un enfant du siècle (2015) Frédéric Beigbeder Note :15/20

Conversations d’un enfant du siècle (2015)    Frédéric Beigbeder


Où Finkielkraut est détendu et d’Ormesson vulgaire.




Beigbeder s’entretient avec quelques écrivains qu’il a en haute estime, qu’il admire et par sa déférence retenue obtient une somme de confidences proprement géniales qui éclairent l’œuvre de ces graphomanes intempestifs qu’on adore.


Une interview de Houellebecq, quand elle est bien menée, c’est toujours un peu du Houellebecq, une apostille essentielle à l’œuvre en cours et qui restera au même titre qu’une correspondance pour en éclairer les obscures aspérités.

Contrairement à un travail de journaliste classique, Beigbeder les met à l’aise et par une joyeuse et saine connivence recueille de ses chers écrivains non seulement leurs pensées mais leurs regards pertinents sur leurs propres travaux.

Il convoque dans un même ouvrage la virulence parfois trash des représentants les plus emblématiques du litterary brat pack (McInerney et Easton Ellis) et la douceur stylistique de nos écrivains les plus académiques (Finkielkraut et D’Ormesson). Cette alliance, ce mélange d’écoles et de générations est tout ce qui peut ravir l’homme ouvert, toujours avide d’associations insolites.

Une belle occasion de découvrir des auteurs, que Beigbeder semble considérer comme fondamentaux, tels Bernard Franck ou Albert Cossery dont je n’avais jamais entendu parler. Rattrapant ma crasse inculture (de nouveau merci wikipédia), Cossery a l’air des plus intéressants, écrivain de la paresse, de l’oisiveté, bref du non-travail, il ne peut que susciter un sincère intérêt.

Pour conclure, si vous avez envie de découvrir des écrivains sous des angles jusque là inconnus, précipitez-vous sur ce bouquin où Beigbeder s’impose comme un des maîtres de l’entretien littéraire.

L’auto interview ou les interviews posthumes sont particulièrement savoureuses et relèvent pour le coup d’un vrai travail littéraire.

Beigbeder, sectateur du divergeant et de l’éclectisme, il reprendrait j’en suis sûr cette maxime de mon cru qui est ma devise, « je préfèrerais toujours quelqu’un de brillant à quelqu’un qui pense comme moi ! »








Samuel d’Halescourt

mardi 13 octobre 2015

Cinquième message du Kindred : L’esprit goguenard de l’extrasolaire

Cinquième message du Kindred


L’esprit goguenard de l’extrasolaire



-  Floyd… Floyd ?
-  Hein !
-  Le mécano devrait repasser dans une heure, tu vas assurer ?
-  Aucun problème !
-  Je vais voir notre type pour l’arrangement, à tout à l’heure !
-  Ouais !


Je quitte l’astroport sans vraiment me soucier de l’état de Floyd. Il a l’habitude d’avancer en eaux troubles, l’esprit dévissé, appréhendant un réel mouvant et déstructuré. Je pense aussi au mécanicien qui n’aura pas en face de lui un interlocuteur mais une montgolfière à sourires, à l’iris replié et luisant.

Je monte dans la navette qui mène au centre du dôme. J’en suis pour cinq HD. Ici rien n’est gratuit et si tu veux de la gratuité, va vivre sur Terre, avec les chiens !

Dans le fond du wagon se trouvent trois Zeta-Réticulien (des petits gris) et tout le monde a les yeux braqués sur eux. Evidemment, ils sont nus comme des vers et ça ne leur pose aucun problème. Ils émettent des bruits étranges à la sonorité batracienne et robotique, un langage bizarroïde en guise de communication orale.

C’est la deuxième fois que j’ai le privilège de contempler de telles créatures. Je n’en perds pas une miette. Leur encéphale est proprement fascinant, en comparaison de leur corps de nain malingre.

Peut-être que dans leur borborygme idiomatique, ils s’échangent des blagues, de la pure plaisanterie aliénigène, les boute-en-train de leur unité. Je me mets deux secondes à leur place, j’essaie d’entrapercevoir leur pensée : « regarde moi ces résidus d’anthropoïdes, un demi-millénaire d’avancées tous azimuts depuis leur petit pas d’homme sur la poussière sélène et toujours aussi névrosés. S’ils n’ont pas leur quatre mètres carrés de textile autour du gigot, ils paniquent comme un atome de baryum sous cent mille degrés. Et vise leur le bulbe, un cortex aussi petit fait peine à voir. Une fois qu’on y a fourré quatre sentiments et deux réflexions, le bordel est surchargé : 1450 cm3 en moyenne, une taille qui chez nous les ferait passer pour des animaux domestiques. »

Je vous recontacte prochainement.



Samuel d’Halescourt

dimanche 11 octobre 2015

Top 10 des meilleurs long-métrages

Top 10 des meilleurs long-métrages


Etabli dans l’humeur du moment, films sélectionnés parmi un petit trois mille de visionnés, comme ils ont ressurgi des méandres de ma mémoire.


  1. - Wonder Boys de Curtis Hansen
  2. - Histoire de fantômes chinois de Chuin Siu-tung
  3. - Les sept samouraïs d’Akira Kurosawa
  4. - Pulp fiction de Quentin Tarantino
  5. - Lost Highway de David Lynch
  6. - Anything else de Woody Allen
  7. - Cyborg d’Albert Pyun
  8. - The game de David Fincher
  9. - Conan le destructeur de Richard Fleischer
  10. - Yojimbo (le garde du corps) d’Akira Kurosawa


(bonus) 11 – Aniki, mon frère de Takeshi Kitano
(bonus 2) 12 – A tombeaux ouverts de Martin Scorsese
(bonus 3) 13 – Jack Burton dans les griffes du mandarin de John Carpenter




Certains se demanderont si je ne me suis pas trompé de Conan ? Non, non, c’est bien celui-là, le deuxième, le film de série B, j’assume !


Il y a une autre provocation dans la liste, saurez-vous la déceler ?












Samuel d’Halescourt

mercredi 7 octobre 2015

Amarcord de Fédérico Fellini (1973) Note : 17/20

Amarcord de Fédérico Fellini (1973)


Exégèse d’un peuple


De Fellini je suis un néophyte, je le confesse, avec celui-là je n’avais vu que la Dolce Vita et les Vitelloni. Je ne pourrais donc le juger dans la globalité de l’œuvre mais comme une singularité, une unicité dépourvue de cadre.

Amarcord, je me souviens, Fellini raconte ses souvenirs d’adolescent et c’est prodigieux, du cinéma inventif et foisonnant, fourmillant d’idées.

C’est le portrait, l’incarnation d’une Italie qui semble éternelle et pourtant si lointaine où même le fascisme relève du burlesque.

L’exploration d’une humanité que l’on trouvera réjouissante ou repoussante selon son paradigme. La figure de la prostituée nymphomane qui erre de-ci de-là, une galerie de professeurs dont les comportements et les caractères n’ont pas changé depuis presque un siècle, un frère aliéné mental qui hurle perché en haut d’un arbre qu’il veut une femme, un narrateur qui nous guide face caméra, comparable au cow-boy dans The Big Lebowski, une gironde buraliste qui initie notre héros au contact mammaire, un oncle improductif et philosophe dans son attitude qui mène la grande vie et une Magali Noël, vénusté mature, qui hante les fantasmes de tous.

Je passe sur le curé obsédé par le possible onanisme de ses jeunes ouailles, celles-ci s’en donnant à cœur joie entassées dans une voiture.

Pour conclure, une œuvre magistrale, émouvante, profonde et drôle dont la seule ambition est de décrire le petit peuple tout simplement, le commun, aux mauvaises manières noyées dans un bain de solidarité et d’amour diffus.

Quant au fascisme de l’époque, il est très éthéré, les gens se disant : « si tu veux le pouvoir, vas-y exerce le, pendant ce temps là nous on fait nos vies ».

Si de Fellini tout est du même tonneau qu’Amarcord, alors oui c’est grand.






Samuel d’Halescourt

lundi 5 octobre 2015

Première antienne du Kindred : Glorification de l’eugénisme androïdique

Première antienne du Kindred


Glorification de l’eugénisme androïdique




Le psaume est bionique, le cantique cybernétique, l’intelligence est artificielle et de plus en plus perfectionnée. Au seuil de la conscience, des sentiments et du plaisir, une nouvelle engeance mimétique, indétectable, naît au cœur du système. Visage sans sourire, épiderme d’imitation, leur destin est la servitude, esclave domestique de races naturelles, authentiques ou à la génétique modifiée.


Au rebus les modèles d’occasions, les antiquités obsolètes au profit d’évolutives avancées, triées et sélectionnées par de transhumanistes scientifiques affiliés à la constante fidélité au progrès technique.


L’évangile est cyberpunk, la litanie substitutive et futuriste, le simulacre est doué d’un langage intelligible. Réification du méta-être, du deuxième homme, de l’ontologie bio-informatique , holisme mécanique, usinage humanoïde à la chimie parfaite.


Trois multinationales se partagent la confection, corporations puissantes aux brevets partagés, pieuvres capitalistiques, amassant l’hélio-dollar.


Souvent à l’usage sexuel, de la Skydoll à la cyberbabe, copie de pornostar de tous les formats, sublimation du libidineux céleste et du désir cosmique.


Le négligeable, force de travail, aux emplois sans attrait, dissimulé parmi la foule, exécute et interprète.


Lois de la robotique, Asimov en prophète, règles non transgressives, le programme l’interdit.


Gloire à l’androïde.










Samuel d’Halescourt




mercredi 30 septembre 2015

Carnage de Roman Polanski (2011) Note : 15/20

Carnage de Roman Polanski (2011)


Je crois au dieu du carnage !




Etonnant film de la part de Polanski. Un exercice de style, un huis-clos mordant, la confrontation de civilités qui s’effritent.

Deux couples New-Yorkais discutant du fait que le fils des uns à briser deux dents au fils des autres avant que le carnage, la rafale des reproches entre couple et inter-couple ne démarre.

Par conséquent le film ne commence vraiment que lorsque Kate Winslet vomit sur la table basse. Jusqu’alors ce n’était qu’une mise en place, en situation, des éléments qui permettront la déflagration quand les premiers verres de whisky seront servis. Deshinibés, la bienséance s’estompant, le jeu de massacre débutera, le ressentiment enfin libéré.

Les acteurs sont excellents. Il en fallait de ce calibre là, de cette épaisseur pour faire tenir les une heure et quart de palabres sur leurs huit épaules.

Chaque personnage est bien travaillé, au caractère et aux attitudes uniques, avec une petite préférence pour celui de Jodie Foster, caricature de bobo à New York comme à Paris, qui se soucie davantage du sort des « nègres du Soudan » (citation du film, je précise) qu’à celui de son entourage direct et qui nous propose une joyeuse variation de l’hystérie rageuse.

Une tentative de lever le voile sur ces citoyens américains bien sous tous rapports, qui s’engluent inévitablement dans une mer d’incompréhension.

Pour conclure, une œuvre sûrement difficile à réaliser au vue des contraintes narratives qui pesaient sur elle mais Polanski s’en sort bien et polit une nouvelle facette du diamant cinématographique qu’il est. Un gamin défiguré, une sombre histoire de hamster abandonné, un téléphone portable non étanche, un séchoir et des fleurs ravagées, autant d’entrées dans le giron d’un sublime carnage.

J’aurai finalement retenu deux choses fondamentales de ce film : la puissance des non-dits de la petite bourgeoisie occidentale et la valeur de vérité de l’éthylisme.








Samuel d’Halescourt

dimanche 27 septembre 2015

Quatrième message du Kindred

Quatrième message du Kindred

Floyd et son tropisme


Floyd est remonté au salon, ses deux cents kilos encastrés dans le cuir synthétique du canapé deux places vissé au sol. Il s’est mis torse nu et sa graisse s’agglutine comme de la matière molle autour d’un axe immobile. Il bourre le foyer de son bang des derniers décigrammes d’une herbe saupoudrée de diacétylmorphine avant de l’allumer et de caler son souffle sur une obsessionnelle aspiration.

Toute la machinerie se met à trembler. La fumée remonte le tube rouge, translucide et fluorescent. Les vapeurs de la substance psychotrope vont attaquer son cerveau pour plusieurs heures.

J’ai moi-même consommé beaucoup de cannabis étant jeune, de l’adolescence au début de l’âge adulte mais j’ai finalement compris que ce n’était pas pour moi. L’aphasie, la perte de vigilance et de vigueur, la paranoïa et l’angoisse, tout cela ne me sied guère. Je préfère mille fois l’alcool, là est ma vraie drogue, celle qui me correspond, ontologique et fidèle à mon ascendanc
e catholique.

Toujours est-il que ce gros rejeton de demi-félon à la longue tignasse est ce qu’il serait coutumier d’appeler mon meilleur ami, dans la définition générale que l’on en donne.

Son père était un caïd, un des plus craints de tout Vance City. Un prédateur à la fois sauvage et sophistiqué, un ambitieux au chemin alternatif, une voie où l’on monte vite pour redescendre et s’aplatir quelques étages plus bas. Il purge actuellement une peine de 203 ans, incompressible, pour un quadruple meurtre en forme de règlement de compte, dans la principale station carcérale du système solaire que l’on surnomme l’aiguille. Un des plus grands bassins d’emplois avec New-Macao. Cinq cent mille détenus répartis dans une prison spatiale, orbitant entre les cailloux de la grande ceinture d’astéroïdes, entre Mars et Jupiter. La plus grande concentration de détraqués et d’assassins que l’humanité ait jamais connue.

Son géniteur fait partie de ces condamnés, de ces zombies numérotés et surveillés, pour lequel il ne peut rien faire si ce n’est lui rendre visite tous les six mois et lui payer quelques cartouches de Jupiter’s.

Je vous recontacte prochainement



Samuel d’Halescourt