Je ne sais pas quand je suis né.
Ce qui signifie que je ne connais pas mon âge. Si ce n’est celui
que je me suis donné, date de mon ouverture à la lumière, au bien,
à la perspective d’un apaisement, d’une respiration.
L’idée simple de pourfendre
tous les cynismes coagulés au fond de mon âme. En finir avec
l’autodestruction, l’état suicidaire permanent, se bousiller à
coups de marteau ridicule sur l’autel du malentendu. Admettre des
références, des fluides porteurs de miséricorde plus forts que
nous, l’altruisme léger encadré par une divinité souriante, la
béatitude, la plénitude, reléguer les fantômes, les démons et
les esprits vengeurs dans le coffre blindé des souvenirs.
Bref j’ai trois ans.
J’appréhende le vrai depuis seulement trois ans, alors bien sûr
je suis encore sujet à quelques soubresauts mais mon dieu que tout
me paraît beau, tout est d’or fin, ciselé par la main même des
anges.
Depuis quelques mois j’habite au
bord de l’océan, cette grande étendue turquoise qui m’apaise
plus que tout. J’en respire l’essence à plein poumon souvent en
pleurant.
La bienveillance reflétée par
chaque mètre carré de ces lieux m’inspire en retour le même
sentiment pour mon environnement. Mes journées s’articulent autour
de mes lectures auxquelles viennent se greffer réflexions
métaphysiques, consommation de tabac et l’écriture de ce présent
ouvrage. Ma phase de rédemption est quasiment révolue. Mon repenti
n’occupe plus guère qu’une dizaine de minutes par jour si l’on
en vient à en compresser tous les accès.
Je suis orphelin, sans aucune
connaissance des miens et pourtant il y a quelques nuits, j’ai fait
un rêve. J’étais au paradis et mon grand-père avec son visage de
chevalier intègre m’a pris dans ses bras. J’ai senti sa chaleur,
son couronnement, son armure bénie contre mon torse. Sa moustache
vibrante m’a dit ces quelques mots : « je te
pardonne ! ». Dans tout mon être une corde s’est mise à
vibrer, C’était celle de l’harmonie, de la quiétude posée
comme un voile sur la monstruosité de mon âme.
Samuel d’Halescourt
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