De l’herbe et des livres
Je me dis que les petits gris ne
peuvent s’empêcher d’entrevoir le monde par le prisme de celui
qui l’aura le plus gros. Finalement chacun son aliénation. Les
hominidés du sérail solaire en sont encore à celui qui l’aura la
plus grosse.
Le centre ville m’ouvre les
bras, pointant à la verticale ses monuments abracadabrantesques,
tordus et colorés. Je m’arrête devant une borne civique et paye
10 HD pour avoir le droit de fumer une clope dans la rue. En grillant
ma Jupiter’s, je flâne devant des boutiques en tout genre :
armurerie, vidéoludisme, robotique, pharmacie ou autre caviste.
Je fais halte dans un débit de
cannabis pour acheter dix grammes de Zelazny à Floyd. Dans la
fédération, la vente de haschisch est légale à partir du moment
où le taux de THC ne dépasse pas 17. Au-delà c’est le marché
noir, la filière parallèle.
Après quoi, je m’arrête chez
un bouquiniste, ces gardiens de la pensée non numérisés, ces
exploitants de la tradition où le rayon ésotérisme s’est
confondu avec le général. Le livre est un résistant, le rescapé
de toutes les révolutions, réfractaire à toute évolution. La
texture du carton de la couverture, l’odeur du papier, le chant des
pages que l’on feuillette. Tout ceci est irremplaçable et ça ne
s’explique pas. Une nostalgie, un sens de la transmission, la
connexion spirituelle avec les générations qui nous ont précédés.
Quelque chose d’intrinsèque à l’homme qui le rend dépendant et
attaché à un support matériel de l’écrit. Mes entrailles m’en
livrent le constat.
Je sors de la boutique avec une
édition de généalogie de la morale de Nietzsche sous le bras
préfacée par Zazé Mobb, la grande théoricienne du
néo-individualisme, de l’eschatologie et des finalités alternées.
Mon amour intellectuel.
Je vous recontacte prochainement.
Samuel d’Halescourt
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