Berlin, 1931, entre fête, bohème et
proto-nazisme
C’est toujours
fascinant de voir une époque traitée par une autre ; ici les
années trente vues par les années soixante dix et visionnées
quarante ans après, cela crée une totale mise en abîme, un méchant
vertige, une perspective étourdissante et algébriquement parfaite,
les tranches décennales séparant les trois époques étant égales.
L’attraction du film
est évidemment la prestation de Lisa Minelli qui donne quelques
bonnes performances sur la scène de son cabaret, le Kit Kat Club.
C’est une histoire
d’amour entre deux exilés américains dans un Berlin interlope sur
fond de montée du nazisme, de miliciens au premier abord débonnaires
mais se révélant ultraviolents.
Nous sommes du côté des
riches, des artistes, des étudiants étrangers et des juifs, des
catégories qui n’ont aucun intérêt à l’instauration du régime
hitlérien et dont le point de vue ne peut éclaircir le pourquoi du
comment du désir populaire.
La part musicale, les
chansons délivrées sur la scène du cabaret sont excellentes et
emblématiques, fidèles à ce que l’on attend de ce Berlin là,
entrecoupée de scènes de la vie courante où une douce bohème
s’abat sur nos héros, à l’âge de toutes les célestes
désinvoltures. L’aventure et l’improvisation comme seul horizon.
Bob Fosse fut certes un chorégraphe célèbre, mais un réalisateur
confidentiel mise à part ce cabaret multirécompensé et oscarisé.
Pour conclure, un film
agréable entre comédie musicale et romance vagabonde et éthérée.
Il est toujours difficile
de dire qu’un film a vieilli, ce qui est une façon de dénigrer
sans trop se mouiller ou paraître objectif. Du coup je m’en
dispenserai et déclarerai simplement qu’il est un archétypal
reflet de son temps. C’est la folie libertaire des années 70,
transposée aux années 30 et fantasmée au travers de ce prisme
hippisant. Même si cela reste très classique et que les artistes
viscéraux, de cabaret ou non, ont toujours eu ce genre de vie.
Samuel d’Halescourt
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